where the wild things are
Maurice Sendak est mort aujourd'hui.
Qui ne se sentirait orphelin à l'annonce d'une telle nouvelle.
Maurice Sendak est mort aujourd'hui.
Qui ne se sentirait orphelin à l'annonce d'une telle nouvelle.
- Ohé, moussaillon !
- Oui, capitaine ?
- Radinez-vous donc avec votre album !
- Tout de suite capitaine !
[Je vous passe les négociations avec le moussaillon, occupé alors à briquer le pont, avant de s'attaquer à la corvée de patates, à moins qu'il n'ait été en train de joyeusement réduire à néant les heures consacrées au rangement de sa carrée...]
- Moussaillon, ouvrez-moi ce livre à votre page favorite, s'il vous plaît.
- Oui, capitaine !
[J'exige qu'il m'appelle "Capitaine" espérant qu'ainsi, il finira par comprendre qui c'est le chef ici !]
- Marcel est un éléphant d'Afrique, très chic. Mais depuis Babar, on savait que l'éléphant pouvait porter le costume avec distinction. Monsieur Marcel a le pied marin, des amis fidèles, un bureau magnifique. Il a eu une vie bien remplie. Bien remplie comme sa mémoire. Car notre éléphant est une véritable encyclopédie. Oui, moussaillon ? Quelque chose à ajouter ?
- J'aime bien aussi la page des bateaux !
- Bonne pioche, moussaillon ! Cet album magnifique est aussi une "encyclopédie bric-à-brac" qui suit les méandres de la mémoire de Marcel. Page de gauche, l'histoire se déroule. Page de droite, une mine d'informations sur des sujets aussi variés que les vêtements, la musique, l'architecture, les animaux, les desserts, le design et les éléphants, évidemment.
- Et les bateaux !
- Et les bateaux ?
- Et les bateaux, Capitaine !
- Je préfère.
- Et il y a même le Titanic !
[J'avoue que j'ai rajouté cette réplique dans le seul but d'y glisser ce lien vers un autre article, des fois que...]
- Les bateaux, donc...
Les informations contenues dans les pages encyclopédiques, loin d'être anecdotiques, sont passionnantes.
- Et moi j'aime bien les documentaires !
- Oui mais, mignon moussaillon, il s'agirait plutôt ici de miscellanées.
- Mie c'est l'année ?
- Miscellanées.
- Missel âne et ?
- Un ensemble de petits textes qui forment une sorte de puzzle, de mosaïque, un exercice d'érudition jamais ennuyeux puisqu'écrit sur le mode du butinage, de la flânerie.
- Si tu veux Capitaine. En tout cas, cet éléphant, il a peut-être une bonne mémoire mais il a oublié un truc que moi, je n'oublierai jamais, tu vois ! Parce que tous ses amis sont venus pour son...
- On ne va peut-être pas tout raconter, moussaillon !
- Ben pourquoi ? Y a personne qui nous écoute !
- Qui nous écoute, non. Mais qui nous lit... Va savoir...
Sur ce même album, voir les articles de Mel de la Soupe de l'Espace, de Sophie Van der Linden et celui de Gaëlle sur cette nouvelle pépite des éditions Hélium !
La mémoire de l'éléphant
Sophie Strady (également auteur de La forêt du paresseux)
Jean-François Martin
Hélium, 2012
"Quand on écrit, faut-il tout écrire ?
Quand on peint, faut-il tout peindre ?
De grâce, laissez quelque chose à suppléer
par mon imagination… »
Cette citation de Diderot ouvre l'album d'Édouard Manceau. Elle situe d'emblée le livre quelque part à mi-chemin entre son auteur et celui qui le lit, entre le texte et l'image, dans un intervalle à explorer, un coin où fureter, au plus près de l’imagination.
C'est l'histoire de Monsieur Pouillot. Tous les matins, il réveille le loup. Un loup de la pire espèce, un vrai loup de conte, qui va immédiatement courir chez Oscar le cochon, lequel va devoir se réfugier chez Amédée avec qui il va s'enfuir… Enfin, c’est ainsi que cela devrait se passer. Mais pas aujourd’hui. Parce qu’aujourd’hui il pleut. Alors tout le monde reste chez soi tranquillement et personne ne pourchasse quiconque.
Édouard Manceau nous raconte ce qui pourrait se passer s’il faisait beau, en marge d’images de forêt sous la pluie, de maisons douillettement entourées de jardins accueillants dans lesquelles on doit être si bien à lire à l’abri. Verra-t-on la course d'Amédée le lièvre, de Nils l’écureuil, de l’ours Popof, puisqu'il pleut ? Et c’est dans le temps suspendu de cette averse que se situe l’histoire qui pourrait être.
|
|
Le texte d’Édouard Manceau est une classique histoire de gentilles bestioles, toute simple, et qui ne se pousse pas du col. Les illustrations, tranquilles et modestes, papiers découpés, feutre, distillent un silence délicieux, juste troublé par le cliquetis des gouttes de pluie.
Et si vous voulez mon avis, je m’installerais bien dans la maison d’Oscar, coquette, pimpante, avec son joli jardin sur le toit.
"Après avoir longtemps habité à la ville, il est venu s’installer ici avec toute sa bibliothèque. Les jours de pluie comme aujourd’hui, Oscar les adore. Bien au chaud sous une couverture écossaise, il dévore des tas de livres."
L’avis de Yann Fastier, gardien du cimetière des lénifiants.
C'est l'histoire d'une histoire
Édouard Manceau
Milan, 2011
une chanson, un album
une chanson de Gilbert Laffaille millésime 1985,
tirée de l'excellent album "Tout m'étonne"
" Le gros chat du marché" est une chanson qui n'a pas pris une ride, toute de malice et d'insolence. Jean-Luc Allart en a fait un grand album, mais vraiment grand, illustré... Et c'est là que mes yeux ont été abusés. Abusés par ces illustrations hyperréalistes incroyables ! Un travail magnifique ! Une rangée d'immeubles aux volets clos, figés dans des années cinquante proprettes en apparence, mais où les cancans vont bon train. Les personnages de Jean-Luc Allart (seules photographies de l'album) ont des airs de santons modernes : le plombier, le gendarme, le boucher, la concierge.
Et le chat. Où est-il ce chat ? Il est partout et nulle part, au centre des discussions, enlevé, mangé qui sait ! À qui se fier, de nos jours, ma bonne dame ? Surtout pas à ces gens bizarres, différents... Et pendant ce temps, le matou se joue des humains qui le cherchent et se métamorphose en tigre redoutable une fois passée la grille du parc...
Au centre de l'album, une quadruple page vraiment spectaculaire s'ouvre sur un jardin public féerique et surréaliste à mille lieues des ragots étalés au dehors. Un décor tout droit sorti d'un conte, anti-chambre du château de la Belle et la Bête...
Un magnifique album tout à fait d'actualité !
Pour vous faire une idée de l'album et de la chanson
- attention à la chanson, une fois entendue, elle est, comment dire... tenace !
Comment vous saviez pas ?
texte de Gilbert Laffaille
illustrations de Jean-Luc Allart
Les Grandes Personnes, 2010
adaptation vidéo de Steven Ligot
& Charles Seignolle
J'aurais pu vous raconter cette histoire de rencontre entre un petit homme gris et triste et une petite bonne femme toute pimpante, tout sourire et robe légère. Leur opposition est si franche, si nette, qu'elle ne peut que bien se terminer, sur le thème "ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants".
J'aurais pu vous parler du texte de Yaël Hassan, un joli texte qui se lit avec plaisir même si les rimes semées ça et là m'ont parfois gênée. En ramenant le lecteur aux mots proprement dits, ces jeux de rimes peuvent parfois troubler le déroulement de la lecture. Comme si le texte se rappellait à notre bon souvenir, comme s'il avait peur qu'on l'oublie et souhaitait sortir un instant de la place qui lui est échue : raconter simplement une histoire.
J'aurais pu prendre part à la micro-polémique qui accompagne cet album. En effet, Aglaé, qui rêve plus que tout de se trouver un jour à la tête d'une ribambelle de beaux bébés blonds, accueille Désiré et le rend à la vie en lui faisant la cuisine, en lavant et repassant ses vêtements, en lui offrant des draps propres qui sentent la lavande...
J'aurais pu...
Mais il y a eu le jaune. Ce jaune incroyable qui gagne peu à peu les dessins de Clotilde Perrin. Et j'ai succombé à ces petits bouts de lumière pure et crue déposés avec science, ces lucioles végétales irradiant de chaleur.
Il y a eu aussi ce jardin merveilleux où aucun vert ne pointe, juste du rouge, du bleu, l'orange que j'aime tant et ce jaune inoui.
Ce jaune, ce jaune ! On s'y éblouit, on pourrait presque s'y réchauffer le bout des doigts. Il est tout simplement fascinant, ce jaune ! Alors, si ça ne vous dérange pas trop, je m'en vais grimper un peu dans cet arbre, pas longtemps, je reviens tout de suite...
Si vous me cherchez, je suis par là...
Là où il y a du jaune...
Voir la critique de Leslie Vega de la librairie Le Bateau Livre à Lille, la réponse de Cécile Boulaire et de Yaël Hassan, et le billet de Gaëlle.
Aglaé et Désiré
Yaël Hassan & Clotilde Perrin
les Albums Casterman, 2012
parce que le Festival du livre jeunesse de Cherbourg s'offre cette année
une thématique pour le moins hasardeuse :
Ogres, dragons et... Titanic !
parce que l'invité d'honneur en sera Philippe-Henri Turin
et que ce n'est que JUSTICE !hum...
parce qu'il sera entouré de Sylvie Chausse et d'Alex Cousseau
parce qu'il y aura aussi, entre autres mais surtout, Kiki et Albert Lemant
et parce que pour l'occasion,
M'sieur Turin s'est fendu d'une affiche de derrière les fagots
une de ces tueries dont il a le secret
une oeuvre titan... esque !
Tout commence par un dessin.
Un très grand crayonné de 123 cm x 91 cm.
Tout est là, les ogres, les dragons... et le Titanic !
Et ce crayonné est le début d'un long, très long travail...
"Je sais que ce n'est pas raisonnable, mais j'ai travaillé près de deux
mois sur cette affiche, entre le moment où j'ai commencé à chercher l'idée et la seconde où j'ai posé la dernière touche de couleur. Il a fallu d'abord trouver une bonne idée ou du moins une
idée... Le thème initial était sur les dragons et les créatures fantastiques, puis le Titanic est venu, plus tard, naviguer sur ces eaux fantasmagoriques, anniversaire oblige. Et là je me suis
demandé comment mettre en rapport des dragons, des ogres et ce paquebot au destin mondialement connu. Quand Catherine Gentile, du salon de Cherbourg-Octeville, m'a dit que Charles était le
bienvenu sur l'affiche, et même plus que le bienvenu, j'ai alors pensé à ce cher Léonardo à l'avant du Titanic. Et voilà, rien de révolutionnaire. D'autres dessinateurs, ce sont déjà servis de
cette image iconique pour faire leur propre illustration...
Après il suffisait de la dessiner, c'est tout. Ce fut long car je voulais représenter la proue du Titanic au plus juste. J'ai cherché des images du film, des documents, des photos de l'épave, et j'ai essayé de m'approcher au plus près. Il y a sûrement des erreurs mais je les assume. Il m'a fallu longtemps avant de bien voir la position des hublots, de comprendre les formes, le nom peint sur la coque, etc... Puis est venu Charles, que j'ai imaginé avec Alex Cousseau, l'auteur. Et ensuite, il m'a fallu choisir comment dessiner tous les autres. J'ai opté pour le clin d'oeil à deux de mes ouvrages antérieurs dont l'auteure est également invitée sur le salon: Sylvie Chausse. Avec elle, j'avais travaillé sur deux livres intitulés "les Ogres" et "Tendres Dragons".
Une fois le crayonné mis en place et accepté par le salon, il m'a fallu acheter une feuille assez grande. Je n'ai trouvé qu'un gigantesque rouleau. La feuille
avait pris la forme arrondie. Ce ne fut pas une sinécure pour passer le dessin à l'encre Sennelier brou de noix. D'autant plus que ma table lumineuse est relativement petite. D'où un temps fou
pour réaliser cette étape sans abîmer la feuille.
Une fois le papier encré et tendu sur une planche adéquate, le ciel fut le premier à être coloré. Et ainsi de suite, lentement pendant un mois plein, en
protégeant au fur et à mesure les parties déjà faites pour empêcher les taches... Laborieux, éreintant, parfois couché sur la planche. Mais vous me direz, je n'avais qu'à faire le dessin plus
petit. Et vous aurez raison. Mais j'avais envie de le faire. Et je suis content de l'avoir réalisé jusqu'au bout et de voir le regard des gens.
L'affiche est-elle fidèle à tes couleurs ?
Alors là, je suis bien embêté parce que je ne me souviens plus des couleurs exactes de l'original. À force de voir des couleurs différentes sur les écrans et de
travailler sur la fin du deuxième Charles, j'ai un peu oublié. Je redécouvrirai mon travail en voyant l'original de l'affiche exposée sur le salon. De plus, je n'ai pas encore vu l'affiche
imprimée. On a toujours des surprises, des pertes, des différences qui sont inhérentes à la technique. Dans l'ensemble, je peux dire que tout le monde a fait un énorme travail et je les remercie
du fond du coeur. Je suis surtout heureux de savoir que l'équipe du salon du livre jeunesse et BD de Cherbourg-Octeville aime mon dessin. C'est le plus important. Ne pas avoir trahi leur souhait
et leurs envies.
L'original sera exposé à Cherbourg-Octeville. J'ai hâte de savoir si les visiteurs vont l'aimer. Et j'ai hâte également de voir les affiches en grand et les bâches et les flyers, et les affichettes et... Bref je suis impatient d'y être. L'affiche sera en vente sur le salon. J'en veux une ! Ça y est, le dessinateur pète un câble...."
Et moi, je ne résiste pas au plaisir de zoomer sur certains détails qui, au choix,
me ravissent,
m'épatent,
m'émerveillent,
me scient,
m'amusent,
me laissent sur le c... flanc,
me clouent le bec.
Merci au Capitaine Turin
d'avoir lâché une seconde le gouvernail
afin de répondre à la passagère légèrement verdâtre
agrippée au bastingage...
Bon vent !
Euh, attendez,
c'est quoi cet énorme morceau de glace, là...
CRRAAAC !
Ahhh !!!
Aux canots de sauvetage !
Les femmes et les dessinateurs d'abord !!!!
pour Paolo,
pour Théodore,
Le jeu des ressemblances au-dessus du berceau est un grand classique. Que n'avons-nous tous entendu ! Encore que, aux abords du couffin de Petitou, je n'ai jamais eu droit à "il ressemble à sa mère !" Non, la bestiole ne me ressemble en rien. Il est châtain clair, grand échalas tout en longueur, droitier, les yeux gris-bleu-vert. En cherchant bien, le nez, peut-être, ou vaguement une oreille. Ah si ! Il est bavard.
Où en étais-je ? Ah oui... De ce moment inévitable, Rascal fait un album précieux, qu'on feuillette en souriant. Une galerie de portraits de famille où chacun s'approprie ce petit bout qui roupille tranquillou, loin de l'agitation des abeilles bourdonnantes. Tous les bébés se ressemblent. Non, il y en a des moches. Tous les enfants finissent par nous ressembler. La preuve : l'amour débordant de Petitou pour le vélo... À moins que ce ne soit nous qui finissions par leur ressembler à force de les vouloir nôtres.
Où en étais-je ? Ah oui... Ce bel album cartonné est fait pour être manipulé par les plus dévastateurs d'entre les minuscules. Chaque double page offre le portrait d'un membre de la famille, au sens large. La moustache de Papy côtoie le profil du demi-frère, certains arborent des contours volontairement flous, d'autres un crayonné précis, agrandi au plus près. D'autres encore vous ont des airs d'estampes précieuses et fragiles bizarrement accrochées à ce carton épais.
Et pendant ce temps-là, l'autre pionce, peinard, comme s'il savait que cette agitation ne sert à rien et finira bien par s'éteindre.
au monde
Rascal
Pastel, l'École des Loisirs,
2012
Lorsque l'enfant paraît, le cercle de famille
Applaudit à grands cris.
Son doux regard qui brille
Fait briller tous les yeux,
Et les plus tristes fronts, les plus souillés peut-être,
Se dérident soudain à voir l'enfant paraître,
Innocent et joyeux.
Victor Hugo (Les feuilles d'automne)
1919
Macao et Cosmage nous toise du haut de son aînesse, du haut de son format qui le fait dépasser dans tous les sens sur le rayonnage, du haut de sa réputation, de sa légende, auréolé de sa première édition estampillée N.R.F., excusez du peu… Il serait le premier livre du genre, premier album de cette envergure destiné aux enfants. Il est signé Édouard-Léon Legrand dit Édy-Legrand.
Ouvrons ce grand livre et tentons d'éviter - ou pas, tout jugement empreint d'anachronisme. Là commence un feuilletage émerveillé, car chaque page tournée recèle merveilles et surprises.
Ce qui frappe immédiatement c’est la modernité du trait, de la couleur. Cet album pourrait avoir été illustré hier. Bon d’accord, avant-hier. Au jeu des références, il y aurait de quoi remplir un cabas tant ce livre fait figure de précurseur sur des styles qui, comme l'Art déco, connaîtront leur heure de gloire au même instant. Macao et Cosmage est le contemporain de Raoul Dufy, de Fernand Léger, et lorgne parfois vers l'art japonais de l'estampe… Lors de la première édition, les grands aplats de couleur seront réalisés à la main.
Macao et Cosmage ou l’expérience du bonheur…
L’expérience du bonheur…
Lorsque s’ouvre ce livre, Macao et sa compagne Cosmage rêvent au pied d’un grand arbre, entouré d’oiseaux et de papillons, sur une île ignorée de tous et de la « civilisation » en particulier… C’est le temps d’une insouciance édénique, rousseauiste à mort - encore que - , à coup d’envolées d’images somptueuses aux mouvements amples.
Jusqu’au jour où un bateau se pointe à l’horizon…
C’était le commandant Létambot et les joyeux marins du croiseur « le Poilu »… Grands chasseurs de sous-marins boches, ils fouillaient, depuis des mois, les mers en tous sens, quand tout à coup, ils avaient découvert l’île de Macao et Cosmage, que ne mentionnait aucune carte géographique…
À partir de là, nos deux héros, qui ont évité les grandes boucheries de l’époque, contrairement à leurs collègues déjà colonisés, vont découvrir en bloc : le drapeau, la patrie, la guerre, les avions, les défilés militaires, les fanfares, le charbon, le fer, l’or, le bruit, le travail, bref, tout ce qui fait l’honneur d’une nation, non ? Macao et Cosmage tentent de s’adapter aux bienfaits du progrès, mais, en parfaits ingrats, ils finissent par s’enfuir au plus profond de l’île, incapables de saisir toute la subtilité et la supériorité du jardin public sur la jungle, des élégants bains de mer sur l’élan primitif de se baigner tout nu dans les cascades.
Le gouverneur lui répondit : « Vous vivez à l’époque des grandes inventions ; l’activité humaine, sous toutes ses formes, est sans limites ! Le bonheur est dans le travail ! » - « Je n’entends rien à votre travail, dit Macao, et je suis trop vieux pour apprendre… »
Quant à la morale de cette histoire, je vous laisse la mastiquer tout seuls, comme des grands…
Macao et Cosmage ou l'expérience du bonheur
Edy-Legrand
réédition Editions Circonflexe, 2000
On m'avait pourtant prévenue : "Mange ta soupe, ça fait grandir !" Mais je me suis entêtée et voilà qu'aujourd'hui, tout le monde me mange la soupe sur la tête. Bisque, bisque, rage ! Maintenant, dès qu'il pleut, je bois le bouillon ! Je n'ai pas pied dans les flaques, je suis trempée comme une soupe...
Mais ce n'est pas parce que je suis petite qu'il faut me marcher sur la tête ! Attention, je ne fais pas dans le velouté ! Je suis soupe au lait et je n'y vais pas avec le dos de la cuillère !
Pour autant, je ne vais pas cracher dans la soupe. Dans un potiron, j'ai creusé ma maison. Alors, quand j'ai les crocs, je mets la marmite sur le feu et par ici la bonne soupe !
Trêve de plaisanterie,
voici de quoi satisfaire mon goût du grand, du bel album
et mon amour des fourneaux.
Alors avant d'en prendre plein les papilles,
affolons-nous les mirettes !
Ce livre regroupe des recettes de soupes des quatre coins du monde, faciles à réaliser, facile à dépayser ! Le tout est truffé de petites histoires, d'anecdotes croustillantes...
Je me suis laissée tenter par une soupe antillaise qui laissait espérer de belles couleurs, orange et corail, douceur et parfum, à l'image des illustrations signées Aurélia Fronty.
Velouté banane et chorizo
Ingrédients: 1 grosse patate douce, 2 bananes plantains, 2 petites carottes, 1 chorizo doux, 1 oignon, 1 boite de maïs (300g), 1 litre de bouillon de volaille, 25 cl de crème fraîche, de l'huile d'olive, du thym, du persil, du sel pour 4 personnes préparation : 25 min cuisson : 35 min |
|
|
"1. J'épluche l'oignon et je le coupe en fines lamelles. je débite le chorizo en rondelles épaisses, puis je divise chaque rondelle en quatre petits morceaux. J'épluche et je coupe en dés la patate douce, les bananes et les carottes. Je fais chauffer 4 cuillères à soupe d'huile dans une cocotte. Quand elle est bien chaude, j'y fais revenir l'oignon et le chorizo pendant 3 minutes.
2. J'ajoute dans la cocotte les dés de légumes et le maïs que j'ai bien égoutté. Je remue et je laisse dorer 3 minutes avant d'ajouter le bouillon, le thym et le persil. Je sale un peu mais pas trop à cause du chorizo et du bouillon qui sont déjà salés. |
3. Je porte à ébullition, puis je baisse le feu et je laisse mijoter 20 minutes sous un couvercle. |
|
|
À l'aide d'une écumoire, je retire les brins de thym et les morceaux de chorizo, et je verse la moitié de la soupe dans un saladier pour la mixer. Quand c'est fait, je le remets dans la cocotte avec les morceaux de chorizo; je fais chauffer quelques minutes. Juste avant de servir je vérifie l'assaisonnement et j'ajoute la crème fraîche. L'ensemble prend une belle couleur corail qui, combinée à l'odeur, ouvre d'emblée l'appétit. " |
À servir dans des petits bols. Enfin, des bolinettes, voire des verrines, si vous êtes adeptes. Parce que c'est le genre de soupe qui rassasie assez vite... Mais c'est délicieux, pas trop sucré - la banane plantain est très peu sucrée. Je n'ai mis que la moitié du chorizo. J'avais oublié le maïs, il faudra donc que j'essaie une autre fois avec, en rajoutant une carotte ou deux.
Une cuisine qui sent bon les soupes du monde (non mais quel titre...)
Alain Serres, Laurana Serres-Giardi
Aurélia Fronty
éditions Rue du Monde, 2011
Que diriez-vous de rendre une petite visite à Petson et à Picpus son chat ?
Retrouver les dessins malicieux de Sven Nordqvist est un régal digne de la plus exquise des gourmandises, comme, par exemple, un macaron basilic-citron. Quel rapport, me direz-vous ? Aucun. Je me damnerais pour un macaron basilic-citron, mais revenons à nos Suédois.
Aujourd'hui, Pettson n'a pas la pêche. Il broie du noir, il déprime, envie de rien, juste attendre que la nuit tombe pour aller se coucher. Mais c'est sans compter avec Picpus...
J'ai feuilleté mon premier Pettson dans une librairie/magasin de jeu en Allemagne - Kunst und Spiel à Sarrebrück, Fürsenstraße 1a - si jamais vous passez par là... Je ne comprenais strictement rien au texte mais qu'importe, le charme a opéré immédiatement.
Les dessins, la composition des pages, tout concourt à plonger le lecteur dans un dilemme affreux : tourner la page ou prolonger le plaisir d'y farfouiller encore. Car il y a toujours dans un coin une créature hypothétique, un détail hilarant, une grenouille un brin barrée qui nous font de l'oeil. Sven Nordqvist tient son lecteur en assez haute estime pour lui proposer ce genre de complicité.
Et ils valent leur pesant de surströmming nos deux camarades ! Le chat frappadingue vaguement hyperactif et le ronchon pas rasé de près, pas habillé à la dernière mode. Clown et Auguste, trublion et bougon, le tout dans un joyeux fouillis résolument anti-Feng shui ! Ah, c'est sûr qu'il ne doit pas faire la poussière tous les jours, ce bon Pettson et qu'il se fout bien que la couleur de ses rideaux soit assortie à la nappe...
Après cette lecture, j'avais presque envie d'une longue balade au bord d'un lac en Suède.
J'ai dit presque.